Aussitôt qu'un homme disparaît de ce monte, il s'opère à son égard dans l'esprit de ses contemporains une sorte de transfiguration, quelquefois mémo de défiguration. On s'empresse autour do sa mémoire, on lui prodigue autant d'éloges qu'on lui en avait refusés jadis, on va même jusqu'à faire de lui de ces portraits de fantaisie qui accentuent les traits les moins saillants de son caractère, aux dépens de ceux qui formaient sa physionomie propre et constituaient son originalité.
Qu'on ne se trompe point à mes paroles. Je suis profondément reconnaissante des hommages si nombreux rendus à mon bien-aimé compagnon de route. Plus ignorante de la vie, je pourrais laisser quelque mélancolie, traversée d'amertume, se mêler à ma gratitude... mais nous savions qu'être apprécié à sa valeur seulement après sa mort est, sauf quelques très-rares exceptions, le sort commun.